Morcat. Journal 2014

créée le dimanche 16 février 2014, 22 h 17Plieux, samedi 15 février 2014, une heure du matin (le 16). Au fond je n’ai pas bougé d’un iota depuis Du sens, et l’on en revient éternellement à la question de la signification — conventionnelle ou profonde, contractuelle ou étymologique, liée à un pacte entre les locuteurs ou fomentée par le temps, par l’origine, par l’origine de l’origine et par l’histoire — des mots : français, Europe, compatriote, etc. Je sors moins que jamais, décidément, du dialogue de Cratyle avec Hermogène.

Un frémissement de protestation intérieure, viscéral, me parcourt chaque fois que j’entends la radio ou la télévision nous apprendre une fois de plus que de jeunes Français sont allés combattre en Syrie au nom du djihad. L’autre soir, mercredi, je crois, c’était tout un reportage assez long, au journal télévisé, sur une fille, cette fois, une “Française”, donc, une adolescente de quinze ans, qui avait quitté sa famille pour aller là-bas, pas pour combattre, était-il indiqué, sans que toutefois les journalistes aillent jusqu’à préciser que c’était pour servir au délassement sexuel des combattants, ainsi que les jeunes musulmanes du monde entier sont invitées à aller le faire, crois-je comprendre, pour assumer leur part de l’effort de guerre. Son frère partait sur ses traces, afin d’essayer de la ramener. Arrivé à la frontière turco-syrienne, il parvenait, contre toute espérance, à la joindre au téléphone. On entendait alors la jeune fille dire à son frère qu’elle n’avait aucune intention de le suivre et de rentrer en France avec lui, qu’il savait très bien qu’elle détestait la France, que par exemple elle ne pardonnait pas aux siens de l’avoir forcée à aller en classe avec des mécréants. On s’étonnait même que la chaîne, si ardemment remplaciste en général, comme tous les médias officiels, ait laissé passer pareil reportage, et particulièrement cette séquence-là, si emphatiquement contraire à la fiction régnante selon laquelle il n’y a parmi les citoyens de ce pays que des Français, tous parfaitement égaux en leur francité. Cette fiction a certes la loi pour elle, mais elle n’est absolument plus tenable. Et même la loi ne peut pas résister bien longtemps à un écart trop grand et trop manifeste entre ses préceptes, si nécessaires ou souhaitables qu’ils aient pu paraître un temps, et la violente réalité des choses.

Au demeurant c’est toute la fiction plus large de l’antiracisme dogmatique qui se craquèle et se fendille et se fissure de toute part, à partir de la fiction principielle selon laquelle il n’y aurait pas de races. En un temps où de plus en plus de ceux-là mêmes qui soutiennent comme allant de soi que les origines ne comptent pas et ne doivent pas être prises en considération s’expriment de toute évidence à partir de leurs propres origines, sont parlés par elles, qui conditionnent toutes leurs opinions et toutes leurs attitudes, le mythe hermogénien de la coïncidence rigoureuse entre les Français de papier et les Français de cœur, de corps, d’âme et d’intelligence, est devenu une forteresse indéfendable, qui doit être évacuée et le sera nécessairement — le plus tôt sera le mieux. Je ne serais pas mécontent que mon procès y contribuât, et je ferai tout pour qu’il en aille ainsi.

Autant dire qu’il ne se présente pas trop bien. D’ailleurs mes troupes fondent comme neige au soleil. Robert Redeker ne sera pas présent, je crois qu’il ne sera pas en France ce jour-là. Je pense qu’il est convenu avec Me Ouchikh d’écrire un témoignage en ma faveur, mais je n’ai pas plus de détails sur ce point.

Alain Finkielkraut pourrait bien se désister également, aux dernières nouvelles. Nous nous sommes parlé longuement cette après-midi. Il croyait que je l’appelais à la suite d’une conversation qu’il avait eue avant-hier avec Ouchikh auquel il s’était ouvert de ses hésitations. Mais non, je n’ai pas parlé à Ouchikh depuis plusieurs jours, et j’appelais Finkielkraut pour tout autre chose (une affaire d’adresse électronique qui ne fonctionne pas). Il a relu avec soin mon discours incriminé, et il fait à son propos deux remarques qui me semblent un peu contradictoires : d’une part que je m’y montre assez flou quant aux moyens de lutter contre ce Grand Remplacement que je dénonce ; d’autre part qu’on peut me soupçonner, puisque je parle de conquête et d’occupation dont la France serait victime, d’appeler à une réaction violente contre l’une et l’autre. Mais si je suis flou je n’appelle pas à une réaction violente. Et si j’appelais à une réaction violente je ne serais pas flou. Or je crois n’être ni flou ni violent : j’appelle très expressément à une réaction politique. Je dis que cette nocence, où je vois l’un des instruments de la conquête en cours, n’est pas faite d’une accumulation bizarre de faits-divers, qui relèveraient de la police et de la justice pénale ; mais qu’elle est l’expression d’une lutte pour le territoire, qui relève éminemment de la politique, et de l’histoire — d’où la création par moi du parti de l’In-nocence, et plus récemment du NON, qui ne sont pas, que je sache, des groupes paramilitaires, et qui récusent expressément la violence.

Cela dit je comprendrais parfaitement que Finkielkraut hésite à me suivre sur ces terrains-là, et je me garderais bien, il va sans dire, d’insister pour l’y entraîner. Notre échange était tout à fait chaleureux et cordial.

S’il décide de s’abstenir après tout ne me resteront que Meyer, qui a pris la place laissée vide par Redeker, et Tali, qui par sa seule existence, sa personnalité et sa culture, contredit totalement, comme fait d’ailleurs Me Ouchikh lui-même, ma thèse générale sur l’impossibilité et l’irréalité de l’“intégration”. Mais j’ai toujours dit et répété, Dieu merci, que la France pouvait parfaitement intégrer des individus, et qu’elle l’avait d’ailleurs très bien fait pendant des siècles ; mais qu’elle ne pouvait pas intégrer des peuples. Or c’est à des peuples que nous avons affaire à présent, et qui se pensent comme tels. Il n’y a que les indigènes qui n’aient plus le droit de se concevoir comme un peuple.

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