NON. Journal 2013

créée le vendredi 26 juillet 2013, 15 h 45
modifiée le samedi 27 juillet 2013, 10 h 16
Vendredi 26 juillet 2013, onze heures moins vingt, le matin.
France Musique, du pianiste Behzod Abduraimov :

« Sa maman est professeur de piano et son papa était professeur de mathématiques ».

Et le papa de Wilhelm Kempff, c’est quoi i’f’zait (question boulot, j’veux dire) ?

*

Il faudrait absolument que j’envoie chez Fayard deux textes par semaine au moins, si le manuscrit complet du dixième (et dernier) volume des Demeures de l’esprit doit être entre les mains de ses éditeurs le 31 août comme je m’y suis engagé. Mais je n’arrive pas du tout à tenir ou seulement à atteindre ce rythme-là ; et par exemple, malgré tous mes efforts, je ne suis pas parvenu à envoyer ce matin comme il aurait fallu le chapitre sur Dumas à Monte-Cristo, sa maison de Port-Marly, après celui qui concernait Bossuet à Meaux, et qui été livré lundi dernier.

Bossuet lui-même n’était pas un chiche producteur de prose mais Dumas me fait honte tant je m’apparais piètre joueur en comparaison avec lui. J’ai tendance à l’oublier quand je pense aux forçats des lettres — et, forcément, j’y pense beaucoup. Je crois bien que même Balzac et Walter Scott doivent rendre les armes devant lui, quant à la quantité (il n’est question ici que de cela, bien entendu). En plus, et contrairement à moi qui suis toujours à geindre et à me plaindre, il paraît ravi de son sort et semble toujours insinuer qu’il pourrait très bien, si besoin était, écrire davantage encore. Ainsi, dans un extraordinaire document qu’il adresse en 1845 à la Société des Gens de Lettres en réponse au pamphlet de Jacquot de Mirecourt, Fabrique de romans, Maison A. Dumas et compagnie, qui l’a accusé d’être à la tête d’une véritable usine de nègres (j’entends d’ici toutes les sonnettes d’alarme retentir gaiement dans les bureaux du Mrap et du Cran…), il explique tranquillement que son collaborateur Auguste Maquet et lui suffisent tout à fait à la tâche et surtout, le plus invraisemblable, qu’ils ont du temps de reste !

« Nous avons fait en 2 ans, Maquet et moi, Les Mousquetaires, 8 volumes, la suite des Mousquetaires, 10 volumes, La Fille du Régent, 4 volumes, La Reine Margot, 6 volumes, Le Chevalier de Rougeville, 3 volumes. Je ne parle pas de Sylvandire et de d’Harmental faits entièrement.

[…] « Calculons d’abord isolément ce que depuis 2 ans nous avons fait seuls ; le calcul prouvera que, si copieux que soit le produit de notre collaboration, chacun de nous a eu encore du temps de reste [cmqs].

« M. Maquet a produit à son nom seul Le Beau d’Angennes, 2 vol., Deux Trahisons, 2 vol., Leurs mots sont un mur + Bastille, Vincennes, Bicêtre, deux mois de feuilleton à la Revue de Paris ; en tout, 15 vol. J’ai produit Georges, 3 vol., Fernande, 3 vol., Gabriel Lambert, 7 vol., Les Frères corses, 2 vol., Amaury, 4 vol., Le Siècle de Louis XIV, 10 vol., Albine, 3 vol., La Galerie de Florence, 4 vol. — 33 vol. sans compter le théâtre et le courant du travail. Ceci est un exemple de ce que peuvent produire deux hommes qui soit isolément soit en collaboration ont pris l’habitude de travailler 12 à 14 heures par jour. »

Sans compter le théâtre, sans compter le théâtre ! Moi aussi j’ai pris l’habitude de travailler douze ou quatorze heures par jour, et sept jours par semaine ; mais, au regard de ces performances, mes cinq ou six volumes par an, les bonnes années, sont de la roupie de sansonnet. Encore suis-je à peu près incapable de répondre à la moindre lettre, surtout lorsqu’elle est accompagnée d’un article ou d’un manuscrit, ainsi qu’il arrive une fois sur deux. Comme dirait Farid Tali (Pierre l’imite à merveille), je suis HHHHHU-milié…

La publication en direct du journal dans “Boulevard Voltaire” ne facilite pas les choses, timewise. Comme je dois livrer ma prose vers minuit ou une heure du matin pour qu’elle figure dans le numéro du lendemain — or ce sont là les heures auxquelles habituellement je m’y mettais —, il m’a fallu chambouler tout mon emploi du temps et rédiger le matin mes entrées quotidiennes, d’où redistribution générale, jeu des chaises musicales des tâches incompressibles.

Les lecteurs du magazine et moi paraissons arrivés à une espèce de modus vivendi, quoique beaucoup d’entre eux semblent toujours ne pas bien comprendre ce que c’est que ce produit bizarre qu’on leur livre. La notion de journal intime paraît sortie de leur culture — il est vrai qu’un journal intime publié en feuilleton dans un magazine, au jour le jour, c’est une espèce de renouvellement du genre. Ils s’obstinent à me parler, souvent très gentiment, d’ailleurs, de mes articles ! Mon Dieu ! Je serais bien incapable d’écrire des articles (en plus de tout le reste) !

voir l’entrée du vendredi 26 juillet 2013 dans Le Jour ni l’Heure

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